Le Château ouvrier

 En plein coeur de la Zac Didot, se dresse une large bâtisse dénommée le "Château ouvrier".

Pas vraiment joli, sans intérêt architectural apparent, il a suscité par le passé de vifs affrontements entre les association du quartier et la municipalité, qui voulait initialement le détruire.

Témoin d'une lutte victorieuse contre les promoteurs, symbole de la préservation du logement social dans le quartier, il a été réhabilité et il est de nouveau habité depuis l'été 2004. En contrebas, plusieurs logements d'artistes ont été construits, qui promettent de riches échanges au sein de la Zac Didot.

Vous pouvez découvrir l'expo photo des travaux de réhabilitation : voir l'expo

Vous trouverez également ci-dessous, en quelques mots, retracée par des coupures de presse, l'histoire du Château ouvrier.

Voir toute l'expo photo de la réhabilitation
Avant...

Après !!!
 


Le Figaro - La Vie à Paris - 14 juin 1997

Dans le XIVe arrondissement

Le carré d'irréductibles du château des Ouvriers

Deux figuiers montent la garde de chaque côté de la porte d'entrée. Ces sentinelles vertes donnent un petit air campagnard à l'immense bâtisse du 71, rue Raymond-Losserand (XIVe), qui répond au curieux nom de château des Ouvriers.

Château est un bien grand mot pour cet immeuble gris, aujourd'hui en piteux état. Un titre qu'il a probablement usurpé à son illustre ancêtre, un pavillon de chasse, entouré d'un vaste parc, construit par le duc du Maine au XVIIIe siècle. En revanche, des ouvriers l'ont bel et bien habité.

Au début du siècle, l'immeuble abritait encore des soeurs. ' Puis il a été vendu à une vieille noble, une sorte de philanthrope aristocratique qui avait décidé d'y loger les pauvres du quartier ', raconte Ghislaine, installée dans son petit atelier de mosaïste du deuxième étage. Les cellules des religieuses ont été transformées en petits deux-pieces, tous identiques, où sont venues s'installer des familles modestes.

Parmi ces ' châtelains ' de la première heure se trouvait Eugène. Arrivé dans les années 30, il a habité l'immeuble jusqu'à sa mort en avril dernier. ' Il nous racontait que le coin était très populaire, poursuit Ghislaine. Il y avait beaucoup d'usines. Le soir, les ouvriers se retrouvaient au bal de la rue Pernety'. L'endroit était fréquenté par des mauvais garçons. C'est pourtant la qu'Eugène a rencontre sa femme.

Enquête publique

L'histoire d'Eugène, c'est aussi son engagement dans la Résistance. D'ailleurs, plusieurs autres habitants du château ont participé à la lutte clandestine contre l'occupant. Après-guerre, le château a coulé une petite vie tranquille dans son îlot de verdure. Jusqu'au jour où des engins de chantier sont arrivés sous ses fenêtres.

A la fin des années 80, la Ville de Paris lançait la ZAC (zone d'aménagement concerté) Didot. Ce programme prévoit notamment la construction de 230 logements sociaux. La Semirep, société chargée de l'aménagement du quartier, a alors racheté le bâtiment dans l'intention de le démolir. Des locataires ont préféré quitter les lieux et, au fur et à mesure des départs, leurs appartements ont été murés.

Alors que les travaux ont débuté sur la place de Maro-Giafferi, quelques irréductibles, dont faisait partie Eugène, refusent encore de s'en aller. Parce qu'il leur était difficile de trouver un logement aussi bon marché, et parce qu'ils avaient ici tous leurs souvenirs, ils se sont mobilisés pour rester.

Ce combat des locataires, relayé par des associations de défense du quartier qui critiquent l'ensemble de la ZAC, a peut-être payé. Le mois dernier, lors d'une réunion de concertation avec la mairie, une solution alternative a été présentée. Le château pourrait être conservé et rénové. Cette modification possible du plan d'aménagement entraînerait l'ouverture d'une nouvelle enquête publique.

A l'Hôtel de Ville, on insiste pour dire que ces plans ne sont encore qu'une hypothèse de travail. Ghislaine reste donc sceptique : ' Tant que rien n'est signé, je n'y crois pas. ' Une nouvelle réunion, le 18 juin, permettra, sans doute, d'en savoir plus.

Mais le désir de négociation de la Ville de Paris a ses limites. Hier, une des associations de défense du quartier, Urbanisme et Démocratie, était assignée en référé par la Sagi. Cette société d'économie mixte de la Ville est chargée des travaux de la ZAC.

A plusieurs reprises, militants et riverains avaient bloqué les accès au chantier, en matinée. La Sagi réclamait 6 000 francs de dommages et 10 000 francs d'astreinte pour toute nouvelle obstruction constatée. Hier, le tribunal des référés a remis sa décision a lundi.

Marie-Douce ALBERT


Le Figaro - La Vie à Paris - 9 octobre 1997

Le ' château ouvrier ' préservé

Le projet d'aménagement du quartier Didot l'avait condamné à la démolition. Le ' château ouvrier ', 71, rue Raymond-Losserand (XIVe), sera finalement conservé et réhabilité. Les associations de défense du secteur ont donc été suivies par le maire d'arrondissement, Lionel Assouad.
La grande bâtisse avait pour vocation d'accueillir des gens aux revenus modestes. Le ' château ' ressuscité devrait proposer des logements sociaux a loyer PLA, avec priorité à ses 21 derniers occupants.


Le Figaro - Paris et Ile-de-France - 25 mai 2000

XIVe ARR.
Deux chantiers pour le quartier Didot

Concertations vertes

Les promesses d'un ' urbanisme à visage humain ' ne feront pas céder les associations du XIVe arrondissement sur leurs dernières demandes.

Lundi, le Conseil de Paris doit se prononcer sur deux opérations d'urbanisme à mener dans les environs de la rue Didot. Les élus se verront ainsi soumettre les réorientations du programme d'aménagement du secteur des rues Didot-Raymond-Losserand.

Cette zone d'aménagement concerté (ZAC), déjà en partie édifiée, avait essuyé de vives critiques. ' Pour la dernière tranche, nous avons repris la concertation et cela a entraîné des changements significatifs ', explique-t-on à la Direction de l'aménagement urbain et de la construction de la Ville. Ainsi le nombre de logements restant à construire a été réduit, tandis que la surface de l'espace vert augmentait. La nouvelle formule du programme officialise encore la conservation du ' château ouvrier ', vaste bâtisse de la rue Raymond-Losserand. Les travaux devraient commencer fin 2000 ou début 2001 pour s'achever en 2003.

Un peu plus loin, le terrain vague encadré par la cite Bauer et la rue des Thermopyles attend son jardin. Une opération de ' requalification ' prévoit un espace vert de 1 300 m2, plus grand que prévu, mais aussi la réalisation alentour d'un programme de 46 logements, neufs ou réhabilités. La délibération de lundi devrait notamment permettre d'engager, pour ce deuxième dossier, la procédure de déclaration d'utilité publique et les travaux seraient cette fois achevés en 2002.

Alors que la Ville souligne l'importance de la concertation menée sur ces deux projets, l'association de quartier Urbanisme et démocratie reconnaît ' les progrès ' accomplis. Elle n'en oublie pas pour autant de poser des questions sur la vie future du quartier. Depuis quelques années, l'association a par exemple pris l'habitude de réunir les habitants a l'occasion de fêtes, dans une cour de la rue des Thermopyles, un endroit aujourd'hui destiné à recevoir des constructions. ' Nous n'espérons pas le garder mais nous souhaitons que ce soit une zone d'urbanisation légère ', explique-t-on à l'association. Elle souhaite encore pouvoir transférer ses activités conviviales dans le futur jardin Bauer-Thermopyles. Du côté de la Ville, on estime d'ailleurs que ' son utilisation ponctuelle pour des événements précis peut s'envisager ', à condition de trouver un accord localement.

L'association souhaite donc ' un quartier accessible a l'intérieur comme a l'extérieur pour l'expression des activités des uns et des autres '. Et d'évoquer alors le manque de locaux pour les associations dans le quartier depuis la fermeture d'un centre social en 1998. La réalisation dans la ZAC Didot d'un espace d'environ 150 m2 a bien été décidée, mais un collectif d'associations refuse d'avoir à attendre 2003 pour pouvoir en bénéficier. Ce matin, ils se réuniront donc une fois de plus place de Moro-Giafferi pour réclamer la mise a disposition de locaux de la ZAC déjà existants et vides. A la Ville, on laissait prudemment entendre que, sur ce point, la réflexion était possible.

Marie-Douce ALBERT